vendredi 29 août 2008

Que la meilleure gagne!

Que la meilleure gagne !

« Mais qu’est ce qu’il lui a pris de l’emmener en vacances avec nous ? » Se demanda Laetitia en épluchant les carottes.
« Ce n’était déjà pas toujours facile de cohabiter avec lui et ses deux fils en vacances, maintenant il faut qu’il nous impose sa nouvelle conquête ! »
« Tu verras, maman, elle va te plaire ! Belle, discrète et si facile à vivre…. » Qu’il m’avait dit le fiston…Ca, pour la première épithète, rien à dire : c’est vrai qu’elle est belle ! Dans le genre blonde, élancée, avec un visage aux trais fins dépourvus de far qui ne manque pas de classe tout en affichant un air un tantinet évaporé. Le fait que Laurent ait souvent accordé plus d’importance à la coque qu’à la graine n’est pas un scoop mais je classerai celle-ci au sommet du hit parade des enveloppes vides ! Je reconnais que j’aurais aimé jouir d’un tel physique à l’époque de mes quarante ans. Mais il faut bien reconnaître que c’est plus facile lorsqu’on n’a jamais porté d’enfants. Avec mes trois grossesses, j’admets que je ne m’en tire pas trop mal au regard des autres mère-grands qui exposent leurs chairs flasques à la plage…Mais franchement qualifier ce moulin à paroles de discrète, c’est un sacré manque de lucidité ! En ce qui concerne le troisième qualificatif, je ne peux que constater que Laurent et moi ne devons pas avoir la même représentation d’une personne facile à vivre ! » Songea amèrement Laetitia en allumant le gaz sous la casserole d’eau.
« Ce n’est pas lui qui a dû se retaper les courses le lendemain de leur arrivée et faire trois magasins avant de trouver les yaourts au lait de soja et autres aliments INDISPENSAAAABLESS au bon fonctionnement de la sirène », rumina la mère en se remémorant les mots d’Anne lorsque le sujet des repas communs fut évoqué:
« Excusez moi mais pour moâââ, le lait c’est de l’arsenic et il est im-pen-saaaaable que je passe un été sans manger mon melon quotidien »…
Une personne facile à vivre ne squatte pas deux heures par jour l’unique salle de bain censée se partager équitablement entre les cinq habitants du T3 familial et ne monopolise pas l’attention générale 24H sur 24H !!!
« Bonjour Laetitia, Oh, déjà dans la cuisine ? J’ai expionnellement bien dormi ! » Clama la belle en sortant de la chambre.
« Eh bien, j’imagine combien vous deviez être fatiguée après les galipettes nocturnes dont vous m’avez fait part à grands cris ! » se retint de dire la cuisinière en plongeant ses carottes dans l’eau bouillante.
« Exceptionnellement ? J’en suis ravie ! » Se contenta-t-elle de répondre.
« Si cela ne vous dérange pas, avant de prendre mon petit déjeuner, je vais aller marcher jusqu’à cette si jolie crypte que Laurent m’a fait découvrir hier.»
« Je pense que vous voulez parler de la crique située en bas de la résidence, corrigea Laetitia, je vous en prie Anne, allez-y » « Et restez-y le plus longtemps possible », Ne put-elle s’empêcher de penser.
Ces vacances allaient sans doute paraître bien longues cette année…..

Laurent fila sous la douche, le cœur léger. Quelle nuit avaient-ils passé tous les deux ! Il ne se lassait pas d’explorer le corps d’Anne afin de la sentir vibrer sous ses caresses…Il pourrait lui faire l’amour jour et nuit durant des semaines….Bien sûr, ce n’était pas facile pour les enfants. Il fallait qu’il essaie de leur consacrer quand même un peu de temps. Mais après tout, leur mamy était là et ne demandait qu’à s’occuper d’eux alors…La vie était belle !
Il rejoignit sa mère qui fumait sa première cigarette sur la terrasse.
« Alors, maman, comment la trouves-tu ? Adoraaaaable n’est ce pas ? »
« Oui » répondit du bout des lèvres Laetitia qui aurait volontiers ôté quelques a au qualificatif employé….
« Au fait maman, je voulais te dire….Ce serait bien de faire des repas plus équilibrés l’été, tu ne penses pas ? Anne fait très attention à son alimentation. »
« Qu’entends-tu par équilibrés mon chéri? S’efforça de demander Laetitia sous contrôle.
« Eh bien je ne sais pas, mais il me semble qu’une assiette de crudités avec melon et jambon cru suffirait le midi par exemple…. »
« Cyril et Jérémy sont en pleine croissance, je te rappelle. Il leur faut des aliments plus consistants qu’une salade de tomates et du melon j’en ai peur.. ; »
« Il suffit de leur faire un plat à part, rien que pour eux alors… »
« Bien reçu Laurent, c’est ce que je vais faire » Conclue Laetitia, un sourire crispé aux lèvres.
Les choses en restèrent là toute la matinée. Personne ne releva le fait qu’Anne avait fini la baguette à son petit déjeuner à grand renfort de beurre et de confiture, forçant Laetitia à racheter du pain en grande quantité.
Le déjeuner sur la terrasse qui offrait une magnifique vue sur la baie d’Ajaccio s’avéra cependant surprenant.
« Tu ne veux pas la vue ma chérie ? » demanda Laurent en voyant Anne s’asseoir dos à la mer.
« Non merci, mon cœur. Je me place ici pour que tu profites de deux belles vues à la fois : moi et la mer… » Minauda la nymphe.
Jérémy manqua s’étouffer avec le bout de pain qu’il venait de mettre en bouche. Le « Elle est adoraaaaaable » de Laurent ne reçu aucune réponse.
« Tenez Anne, votre assiette de crudité. »
« Merci Laetitia, c’est vraiment gentil, elle a l’air délicieuse. Et c’est quoi dans le plat ? »
« Des pates carbonara pour les enfants qui ne raffolent pas trop de la verdure. »
« Super ! J’adore ça. Je te sers Laurent ? »
« Non merci ma chérie, je vais me contenter de cette succulente assiette »
« Equilibrée » ne put s’empêcher de rajouter Laetitia.
« Ce pain est délicieux ! J’en prendrai bien un bout avec mon fromage, peux tu me le passer Cédric s’il te plait ? »
« Il ne s’appelle pas Cédric mais Cyril, ma chérie »
« Ah pardon, je n’arrive pas à m’y faire. Il faut dire que je n’ai jamais connu de Cyril, c’est très rare comme prénom ! »
« Vous connaissez un Cédric ? » Ne manqua pas de demander Laetitia
« Non, je ne connais aucun Cédric » Répondit Anne après réflexion.
« Faut pas chercher à comprendre » Marmonna Cyril le nez dans son assiette.
« Les enfants, vous pouvez aller chercher votre dessert et le manger ailleurs »
« Merci mamy ! »
« Oh les belles glaces ! Ne sont-elles réservées qu’aux enfants ? » S’inquiéta Anne.
« Non, bien sûr que non, vous pouvez en prendre une si vous n’avez pas peur de vous empoisonner.. »
« Pourquoi me dîtes vous cela Laetitia ? »
« Eh bien parce que j’ai bien peur que les magnums vanille ne soient pas réalisés au lait de soja ! »
« Ah, mais de temps en temps il faut prendre des risques » rattrapa Laurent en fusillant sa mère des yeux.

« Viens…. »
« Non, pas dans la chambre de maman… »
« Mais si ! Elle est occupée dans la cuisine avec le lave-vaisselle qui tourne, elle n’entendra rien… »
« Ca me gène… »
« Ca m’excite… »
« Huummmm, ok tu me ferais faire n’importe quoi ! »

« Mamy, mamy, il faut faire quelque chose ! » Cria Jérémy en se précipitant dans les bras de son aïeule.
« Cyril et moi ne la supportons plus ! Aide nous à nous en débarrasser. Papa est devenu complètement sourd et aveugle. Il fait comme si nous n’existions plus. Elle nous coupe la parole, mange comme quatre, ne retient pas nos prénoms. Puis elle ne sait même pas parler ! »
« Tu as raison mon chéri, nous allons essayer de réveiller le prince charmant. Une semaine devrait suffire ».
Le plan d’attaque de Laetitia était simple : modifier l’enveloppe corporelle de la belle pour que l’esthète s’en détourne.
Elle se mit à préparer des plats excessivement caloriques de plus en plus tôt le matin. Le fumet délicieux qui s’échappait des fourneaux incitait Anne à avaler une baguette et demie au petit déjeuner. Au déjeuner et au souper, Laetitia lui proposait systématiquement deux ou trois fois du plat de résistance, ce à quoi Anne acquiesçait invariablement, l’œil gourmand. Chaque mot déformé dans la bouche de la nymphe était patiemment corrigé en présence de Laurent. Laetitia avait aussi eu la bonne idée d’instaurer des jeux de société le soir, véritable calvaire pour Anne qui ne retenait aucune règle et se ridiculisait chaque fois un peu plus.
« Scrabble » annonça Jérémy en posant le mot « suranné » au bout du « e » déjà placé de fève. « Bravo mon chéri ! » S’extasia Laetitia.
« Ce mot n’existe pas ! » Affirma Anne.
Jérémy, heureux de voir la mine de son père s’assombrir, expliqua : «Cela signifie obsolète, désuet, périmé, Anne ».
Anne devint de plus en plus perplexe. Laurent, un peu énervé, clôtura le suspens en rajoutant que suranné signifiait « vieux, passé »
« Ah d’accord…Quel beau mot ! Vous en connaissez des choses, quelle chance vous avez ! A toi de jouer, je crois, Cédric…..»
« Cyril, Anne, je m’appelle Cyril…. »
« Excuse-moi, c’est tellement peu commun ce prénom…Je me concentre, je me souviens qu’il commence par un C mais je ne pense pas au I qui suit alors cé devient Cédric c’est logique finalement. »
« C’est drôle comme les concepts de logique peuvent différer selon les individus… » Constata Laetitia.
« Excusez-moi Laetitia mais la cigarette m’incommode vraiment…Cela ne vous dérange pas si je change de place afin d’éviter la fumée ? »
« Non, chérie, maman va aller fumer plus loin, n’est ce pas maman ? »
« Mais nous sommes sur la terrasse, en plein air ! Je ne vais quand même pas aller sur le parking pour fumer ! »
Laetitia se demandait si cette contre attaque de sa victime était « pensée ». Il fallait peut-être se méfier de la sainte nitouche qui pouvait peut-être s’avérer plus rusée que prévu. Le fait qu’elle ait eu l’impression que sa chambre avait été visitée n’était sans doute pas à négliger non plus. Songer que cette femme ait pu entraîner son fils dans des ébats pervers dans son havre de paix, peut-être même sur SON lit, lui donnait la nausée.
« Cela m’apprendra, pensa Laetitia, il ne faut jamais sous estimer son adversaire… »
Anne et Laurent venaient de se rejoindre dans leur chambre. Anne s’assit sur le lit, la mine renfrognée.
« Chérie, ne m’en veux pas de te dire cela mais as-tu vu comme tu te goinfre ? C’est mal poli de tant se resservir d’un plat, tu sais…»
« Mais ta mère me le propose ! »
« Oui mais la prochaine fois tu peux refuser poliment. J’ai l’impression que tu as un peu grossi, non ? »
« J’ai effectivement eu du mal à fermer ma robe hier….mais Laetitia est si bonne cuisinière ! Je suis heureuse que tu t’inquiètes pour moi mon chéri. Justement, il faut que je te dise que je sens des mauvaises ondes dans cette maison. Je n’arrive pas à retrouver mon équilibre intérieur. C’est comme un arbre aux feuilles repliées parce qu’il aurait perdu son imperturbabilité. Je ne ressens pas d’harmonie… »
« Peux-tu te montrer plus claire, chérie ? »
« Eh bien je déteste exprimer des choses négatives mais ne penses-tu pas que ta mère et tes fils me détestent ? Ils me lancent des regards noirs, corrigent sans cesse ce que je dis et ne semblent pas m’écouter ! Je sais bien que je suis moins instruite que vous mais je ne suis pas bête au point de ne pas comprendre qu’ils cherchent à me rabaisser à tes yeux.»
« Tes propos sont excessifs mon ange »
« Je ne comprends pas ce mot »
« Lequel ? »
« Excessif »
« Cela veut dire beaucoup trop, comme ce que je vais te faire dans les heures qui vont suivre ! » dit Laurent en arrachant les boutons pressions de la jupette blanche d’Anne qui retrouva le sourire en s’allongeant sous Laurent.
« Tu m’aimes ? »
« Je t’adore »
« Même si je ne sais pas toujours employer les bons mots ? »
« J’aime la façon dont tu t’exprimes ma chérie, je trouve cela charmant. »
« Tu aimes ce que je te fais là ? »
« Huuummmm, jamais personne ne me l’a fait aussi bien ! »
« Mon cœur ? » dit Anne en se relevant soudain.
« Ce serait formidable si nous pouvions être un peu seuls tous les deux….On pourrait faire l’amour toute la journée. Je ne serai plus obligée de me mettre un oreiller sur la bouche, qu’en penses-tu ? »
« Je vais y réfléchir… »
« S’il te plait … » Murmura Anne en plongeant sa bouche pulpeuse sur le sexe de Laurent.


« Bonjour Anne, bien dormi ? »
« Oui, merci Laetitia, ce doit être l’air de la mer… »
« Où certains assauts différents de celui des vagues… » Pensa Laetitia.
« Je vous ai fait griller vos tartines ce matin et j’ai même acheté quelques croissants. »
Anne jeta un regard inquiet vers la chambre. Laurent devait dormir encore. Elle n’aurait qu’à pas lui parler de ce petit extra matinal, ces croissants semblaient tellement bons !
« Merci Laetitia, c’est très gentil de votre part »
Plus tard, au moment du goûter très exactement, Jérémy demanda s’il restait de ces si bons croissants au beurre que sa mamy avait acheté et Laurent entendit distinctement sa mère répondre qu’elle était fort désolée pour ses chéris mais qu’Anne les avait trouvés tellement bons qu’elle avait mangé les trois derniers en plus de ses tartines au petit déjeuner…
« Peux-tu mettre de la musique Jérémy s’il te plaît ? Je n’ose pas demander à Cédric, il est occupé à lire un livre qui contient au moins deux cent pages ! »
« Tu veux sans doute parler de Cyril ? »
« Oui de ton frère »
« Que veux-tu comme musique ? »
« J’adorerai de la salsa, j’étais une reine de la danse il y a quelques années … Je vais te montrer »
Au premières notes de musique, devant l’air ébahi de Jérémy, Anne leva les bras et entama un pas de danse avec une grâce à vous couper le souffle. Laetitia qui arrivait dans le salon avec un gâteau au chocolat dans les mains faillit en faire tomber son plat ! Anne apprivoisait l’espace à petits coups de hanches et d’épaules, la tête bien droite, une flamme sauvage dans ses yeux. Laurent et Cyril attirés par la musique, arrivèrent au salon et se figèrent devant la danseuse. Tous étaient subjugués.
Laetitia décida une trêve momentanée et la soirée fut détendue.
Cependant après le dîner, Laurent demanda à sa mère si elle ne voyait pas d’inconvénient à ce qu’Anne et lui partent deux trois jours en amoureux.
Sentir sa proie lui échapper plongea Laetitia dans un grand désarroi. Sa nuit fut agitée de cauchemars…..


Quelques jours s’écoulèrent à trois. Entraînés par leur grand-mère, les garçons enrichissaient leur vocabulaire de nouveaux mots, beaux et peu usités. Laetitia avait investi dans l’achat de livres de recettes toutes plus alléchantes et caloriques les unes que les autres.
A son retour, Laurent semblait fatigué et Anne plus affamée que jamais.
Les garçons se montrèrent ravis que leur père leur propose de plus en plus souvent des activités « entre hommes ». Ils partaient tous les matins avec masques et tubas débusquer seiches et calmars tandis que Laetitia cherchait désespérément des moyens d’échapper au babille incessant d’Anne qui n’avait comme seul sujet de conversation sa petite personne, mais qui pouvait le décliner à tous les temps, sans faiblir des heures durant !
Des boissons sucrées étaient venues accompagner les repas. Des chocolats trainaient un peu partout dans des petites boîtes ouvertes sur les tables et il faut bien reconnaître qu’Anne grossissait à vue d’œil. Laetitia avait remarqué que les nuits semblaient maintenant bien silencieuses…..
Inversement, la cuisinière avait minci. Sans doute grâce à l’énergie qu’elle déployait en courses (elle allait chercher à pied, le pain et les croissants dans la boulangerie située à deux kilomètres de la résidence) et dans la préparation de grands repas. La jouissance qu’elle tirait d’avoir placé son intelligence au service de la destruction de ce couple si mal assorti et la sensation de pouvoir qui en découlait la nourrissait suffisamment pour qu’elle ne touche quasiment pas à ses bons plats.
Elle s’était surprise à rêver devant la penderie ouverte d’Anne. Cet après midi, elle comptait même essayer la petite robe noire légère au superbe décolleté….

C’est au bout de la deuxième semaine que l’atmosphère des repas devint franchement désagréable à force de non-dits et de sous-entendus.
« J’étais hynoptisée par la beauté du coucher de soleil hier », lança Anne avec ferveur.
« Hypnotisée », Corrigea sèchement Laurent.
« Fais un effort Anne bon sang ! Et arrête de bouffer ! »
Un grand sourire illumina enfin le visage de Laetitia.
Ce ton excédé présageait la sortie du jeu de la belle.
Etrangement la pensée qui suivit la victoire fut que les vacances risquaient de sembler ennuyeuses maintenant.




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